La question du jour dans Mismatch : Comment peut-on mettre en place de l’accessibilité motrice ?
Chères auditeurices,
Bonjour et bienvenue dans Mismatch, l’émission dédiée à l’accessibilité des jeux vidéo. Elle est destinée aux professionnels, aux néophytes du média mais aussi aux joueurs et joueuses. Je suis Damien Fargeout, game designer de formation, consultant en accessibilité de jeux vidéo et président de l’association Dear Valid People. Chaque semaine, nous mettrons en lumière, ensemble, chaque pièce du puzzle formant ce jeune domaine qu’est l’accessibilité de jeu vidéo. Étant moi-même handicapé, ma formation mêlée à mon expérience de vie m’a amené à me spécialiser sur le sujet.
Dans le précédent épisode, j’ai présenté les quatre familles de l’accessibilité. Elles ne sont pas tant à prendre au pied de la lettre, vraies en toutes circonstances qu’un guide permettant un premier point d’entrée dans ce nouveau monde. Il est temps de consacrer les prochains épisodes à chaque famille et commencer par la première: l’accessibilité motrice.
Au-delà du matériel adapté, chaque jeu vidéo doit implémenter une flexibilité pour que leur fonctionnement soit optimal, dans le cadre de l’expérience de jeu. Il sera nécessaire d’offrir une liberté d’interactions au joueur et qu’il soit capable de les ajuster à ses capacités. Car lui seul est capable de dire ce qu’il peut faire ou non. L’accessibilité, c’est avoir le choix.
Avant d’aller plus loin, il faut garder en tête que chaque projet de jeu vidéo est différent et que certains possèdent une accessibilité native. C’est-à-dire que leur genre peut donner lieu à une base d’accessibilité par défaut (ou by design, nous reviendrons sur ce terme). Ce n’est pas pour autant qu’un lot d’options ne doit être pas pensé.
L’une de ces features, une des premières qui vient en tête des développeurs, est de modifier le mapping par défaut : le remapping. Il peut se présenter de différentes manières, nous les détaillerons dans un épisode dédiée à cette fonctionnalité. Elle existe depuis quelques temps déjà mais pas sous la bannière de l’accessibilité, mais comme une optimisation de performances de certains joueurs. Le remapping leur permettrait un meilleur confort de jeu. Cet amalgame entre “confort” et “accessibilité” est un argument avancé contre ce domaine montrant uniquement une incompréhension de celui-ci. Dans le cas des joueurs handicapés, il ne s’agit pas de confort mais d’accès. Le remapping est complexe et demande un travail d’anticipation puisque si des touches peuvent être changées, il faudra alors que l’entièreté du jeu s’adapte, dans l’affichage de tutoriels par exemple.
En deuxième feature phare de l’accessibilité motrice, je parlerai d’assistance à la visée. Prolongement d’options existantes comme la sensibilité des joysticks, cette option est associée à la majorité des jeux vidéos existants : les FPS. Plus généralement, lorsque de la précision est demandée à un joueur, cette feature est censée accompagner le gameplay. À nouveau, plusieurs méthodes peuvent être employées, rendant cette option plus ou moins efficace. Il s’avère que cette option est aussi utile dans le cadre de l’accessibilité visuelle.
Durant les années 2000, un nouveau type d’interaction est devenu populaire dans le jeu vidéo au travers des QTE, Quick Time Event. Pendant ce qu’il semble être une cinématique, il est demandé au joueur d’appuyer sur certaines touches au bon moment ou d’appuyer sur celles-ci rapidement. Ces actions demandant réflexes et souplesses ne sont pas toujours possibles ou à un prix énergétique, impactant le reste de la progression du joueur. Pourtant, ces QTE sont obligatoires où sans réussite, l’expérience est interrompue abruptement. Dans la même lignée de préserver énergie et expérience du joueur, maintenir une touche peut être épuisant. Il sera alors proposé un système en appuyant sur une touche pour basculer d’un état à un autre (le toggle, pour les intimes).
Pour finir, je veux vous parler de l’ajustement de variables. Un jeu vidéo en est composé de pleins : la santé du joueur, la santé des ennemis, l’endurance, la vitesse de jeu etc… L’accessibilité peut être un juste équilibre entre ces variables, où le joueur peut produire sa propre recette.
Cette liste est loin d’être exhaustive mais elle permet d’avoir un premier aperçu des options d’accessibilité motrice. Chacune et d’autres non détaillées ici auront droit à son épisode avec des exemples concrets. Dans le prochain épisode, nous lèverons le voile sur une nouvelle famille : l’accessibilité visuelle.
Vous venez d’écouter Mismatch, une émission créée par un concerné pour des concernées.
Diffusion vendredi 18 octobre 2024 – 10h20
D.Fargeout