Le premier pilier de l'accessibilité : le hardware Divergence
Toutes expériences vidéoludiques commencent par l’utilisation d’un contrôleur, d’une manette. Sont-elles adaptées aujourd’hui à la diversité des corps des joueurs ? Qu’est-il proposé sur le marché à ces joueurs ? Est-ce suffisant pour rendre accessible le jeu vidéo ?
Toutes les réponses sont dans ce nouvel épisode de Mismatch.
Chères auditeurices,
Bonjour et bienvenue dans Mismatch, l’émission dédiée à l’accessibilité de jeu vidéo. Elle est destinée aux professionnels, aux néophytes du média mais aussi aux joueurs et joueuses. Je suis Damien Fargeout, game designer de formation, consultant en accessibilité de jeux vidéo et président de l’association Dear Valid People. Chaque semaine, nous mettrons en lumière, ensemble, chaque pièce du puzzle formant ce jeune domaine qu’est l’accessibilité de jeu vidéo. Étant moi-même handicapé, ma formation mêlée à mon expérience de vie m’a amené à me spécialiser sur le sujet.
Dans le précédent épisode, j’ai pu parler des trois piliers de l’accessibilité : la partie matériel (hardware), la partie logicielle (software), que je souhaiterais renommer comme la partie design aujourd’hui ainsi que la représentation. Dans ce nouvel épisode, je souhaite explorer avec vous le premier : le hardware. La problématique semble plutôt évidente. Comment peut-on jouer au jeu vidéo lorsque nous n’avons qu’une main ou un manque de flexibilité des doigts ? Si nous parlons de manette de consoles de jeu, l’utilisation de deux joysticks demandent deux mains et un nombre de plus en plus grand de boutons sur les contrôleurs demande une souplesse des doigts pour les atteindre tous. Le nombre grandissant d’interactions dans un jeu vidéo produit des combinaisons de touches de plus en plus complexes à réaliser pour un joueur. Et ne parlons pas de l’utilisation du clavier dans le cadre du PC, du pavé tactile sur Switch ou de la détection de mouvements !
Mais existe-t-il des solutions pour pouvoir profiter d’une expérience vidéoludique ? Comme j’ai pu le dire lors du précédent épisode, les joueurs handicapés ont dû trouver des solutions par eux-mêmes. Depuis plusieurs années, le vent tourne avec la naissance de contrôleurs adaptés créés par les constructeurs eux-mêmes. En 2018, Microsoft a sorti la Xbox Adaptive Controller. XAC, pour les intimes (et les débutants en anglais). La grande force de cette manette se situe dans sa capacité d’adaptation. Elle se présente comme un contrôleur des années 80, c’est-à-dire avec une croix directionnelle et deux boutons principaux. En revanche, sa taille est bien plus grande avec la possibilité d’appuyer sur les touches avec ses poings pour celles et ceux qui n’auraient plus le contrôle des doigts. La véritable innovation est l’ensemble des entrées offertes par le produit. Deux entrées USB sur les côtés simulant le joystick gauche et droit d’un contrôleur classique. 18 entrées Jack à l’arrière correspondent à chaque touche d’une manette Xbox classique, laissant le choix au joueur l’utilisation de matériel différent pour interagir avec ces touches. Des interrupteurs de différentes tailles, ultra sensibles ou d’autres joysticks. Il est alors possible de déporter ces touches, qu’elles ne restent plus dans un espace défini d’une manette mais qu’elles puissent être à la portée des capacités d’un individu. Comme permettre l’utilisation de la tête pour l’activation d’une touche et pouvoir repenser le fauteuil roulant comme un support de ces interrupteurs. Il deviendrait alors une “manette” ajustée à son propriétaire.
L’année dernière, Sony a sorti sa propre manette adaptée pour sa Playstation 5 du nom d’Access Controller. Nintendo reste encore le mauvais élève en cette matière puisqu’il n’a sorti officiellement aucun matériel adapté pour la Switch. Cependant, il est possible de trouver un contrôleur du nom de Horiflex, ayant un fonctionnement au XAC. Il a un défaut majeur : il n’est pas compatible avec l’ensemble du matériel adapté disponible.
Bien que le marché fleurisse, d’autres problématiques adjacentes perdurent telles que l’accessibilité financière, ces contrôleurs ont un coût plus élevé que les contrôleurs ordinaires. Et malheureusement, il ne suffit pas d’avoir un de ces contrôleurs pour rendre accessible l’ensemble du jeu vidéo actuel. Les designers doivent prendre en compte ces nouvelles possibilités d’interaction dans la conception d’un jeu vidéo et cela sera le sujet de notre prochain épisode !
Vous venez d’écouter un épisode de Mismatch, créé par un concerné pour des concernés.
Diffusion vendredi 27 septembre 2024 – 10h20
D.Fargeout