Thérapies alternatives

On reçoit tous des conseils non sollicités plus ou moins régulièrement, que ce soit sur notre poids, notre coiffure, notre vie amoureuse ou nos choix professionnels. Mais quand on est handicapé ou malade chronique, c’est notre lot quotidien. n

• Dis-moi, tu as testé l’acupuncture pour tes douleurs ? Je connais un très bon praticien.
• Tu es toujours sous anti-dépresseur ? C’est pas naturel quand même, pourquoi tu n’essaies pas la sophrologie à la place ?
• Tu as lu cet article sur ce tout nouveau traitement expérimental au Japon ? Il paraît qu’une petite fille a retrouvé l’usage de ses bras !
• Moi je bois du jus d’aloe vera tous les matins, c’est super efficace pour les intestins. Tu devrais essayer !

nnÇa part toujours d’un bon sentiment et d’une envie d’aider, mais oui, on a déjà essayé l’acupuncture, les huiles essentielles, et les infusions de sauge. Souvent, les personnes handicapées ont déjà testé à peu près tout ce qui pouvait être susceptible de les soulager ou de les guérir. nnnIl ne s’agit pas de remettre en question toutes les thérapies alternatives. Hypnose, sophrologie ou phytothérapie, si quelque chose fonctionne vous, franchement tant mieux. Il s’agit de pointer la capacité qu’ont les gens de vouloir à tout prix proposer ces thérapies alternatives avec pour seule base « scientifique » leur propre opinion sur la question. Le fait que ça fonctionne pour vous, votre sœur ou votre voisin ne veut pas dire que ça fonctionne pour tout le monde. nnnJe l’ai déjà dit et je le répète, il existe presque autant de handicaps que de personnes handicapées. Chaque situation est unique, et c’est encore plus vrai pour les personnes qui cumulent plusieurs handicaps. nnnDe manière générale, il faut éviter de donner des conseils non sollicités sur le parcours médical, le diagnostic ou le traitement des personnes handicapées, et ce même si vous pensez connaître un peu leur parcours ou leur vécu. On ne se rend pas compte, mais l’aspect répétitif et intrusif de ces conseils peut être particulièrement difficile à vivre. D’autant que les expériences diffèrent d’une personne à l’autre. Certains malades avec des douleurs chroniques voudront essayer toutes les astuces existantes, du régime sans gluten à la microkiné. D’autres considérerons que la maladie prend déjà trop de place dans leur vie, et n’auront pas envie d’y consacrer encore plus de temps ou d’énergie.nnnDans tous les cas, respectez ce choix. C’est notre corps, notre handicap ou notre maladie. Il est essentiel de ne pas imposer ses convictions, surtout dans le domaine de la santé.nnnD’autant que certains conseils peuvent être tout bonnement dangereux. Par exemple, on ne conseille pas à quelqu’un d’interrompre son traitement médical pour le remplacer par des plantes ou un régime alimentaire particulier. Beaucoup de traitements ne peuvent pas être interrompus sans avis médical, comme les psychotropes et antalgiques, et leur arrêt brutal peut créer des situations de détresse. Inutile aussi de suggérer de demander tel traitement révolutionnaire à notre médecin référent, ce dernier est généralement bien au courant de la pharmacopée existante et sait comment gérer les potentielles interactions médicamenteuses et effets secondaires.nnnS’il existait véritablement un traitement révolutionnaire, une plante magique ou une recette de grand-mère pour traiter ce que nous avons, tout le monde l’utiliserait ! La médecine est une chose complexe, et le suivi pluri-disciplinaire des personnes handicapées se compose au fil des années, grâce à une connaissance pointue de la personne, de son historique et de ses particularités.nnnSi vous souhaitez vraiment vous impliquer dans le traitement d’un de vos proches malade ou handicapé, essayez plutôt de l’accompagner aux rendez-vous, aidez-le à supporter au mieux les effets secondaires, ou soyez juste présent pour l’écouter. Honnêtement, c’est le type de soutien qu’on attend vraiment de notre entourage.nnnJe profite du sujet pour faire un petit aparté sur les thérapies alternatives ou médecines douces. On le sait, ces pratiques peuvent parfois procurer un bien-être appréciable. Effet placebo ou pas, ce n’est pas à moi d’en juger. nnnMais il ne faut pas oublier que ces thérapies alternatives ne fonctionnent sur aucune base scientifique prouvée, et que les personnes qui les pratiquent n’ont souvent aucune formation académique. J’ai cherché sur internet, on peut se former au reiki en seulement 5 jours. Et si vous avez un peu plus de temps devant vous, en 25 jours, vous pouvez être certifié Maître-Praticien en hypnose Ericksonienne. C’est vrai que ça claque comme titre, mais permettez-moi de douter légèrement du sérieux de ces formations. nnnPar ailleurs, derrière une façade inoffensive, certains praticiens n’hésitent pas à abuser de leur position auprès de leurs patients les plus fragiles, quand ils n’exploitent pas carrément la détresse de ceux-ci. D’après le site de la Miviludes, la mission interministérielle qui observe les phénomènes sectaires, “la dérive thérapeutique devient sectaire lorsqu’elle essaie de faire adhérer le patient à une croyance, à un nouveau mode de pensée”. Méfiez-vous si le traitement proposé vous est présenté comme un traitement miracle, si on vous encourage à abandonner immédiatement vos traitements classiques, ou si le pseudo praticien discrédite systématiquement les personnes de votre entourage qui remettent en question sa méthode.nnnLes dérives sectaires pullulent dans le domaine de la santé, avec des conséquences parfois dramatiques pour les personnes malades et handicapées. Il est donc essentiel de rester vigilants face à ce phénomène.nnnC’était Béatrice, pour “Viens te faire dévalider !”. Je vous dis à la semaine prochaine. nnnnnnnnDiffusion mercredi 12 octobre 2022 – 10h20 / 17h05nnnnB.Pradillon« 

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